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Des tonnes de guêpes... et de piqûres !

Les aléas climatiques semblent avoir favorisé la survie des reines guêpes, l'hiver dernier. Résultat : il y a plus de colonies qu'à l'habitude sur le territoire et les piqûres d'insectes sont en hausse.

Par Guillaume Roy, Initiative de journalisme local- LE QUOTIDIEN

À trois reprises au cours de l'été, l'auteur de ces lignes s'est fait piquer par des guêpes en forêt. Ce n'était pas la première fois, ayant déjà été piqué six fois lors d'une seule occasion. Mais pas de réactions autres qu'une enflure locale.

À la deuxième piqûre, cet été, le bras a enflé jusqu'au coude. Et quelques semaines plus tard, deux piqûres en l'espace d'une minute, sur la cheville et sur le poignet, ont dégénéré. Les lèvres se sont mises à enfler et des plaques rouges sont apparues partout sur le corps. Heureusement, la gorge n'a pas enflé, rendant possible le déplacement par ses propres moyens à l'urgence, ce qui est recommandé lors d'une telle réaction systémique. Une dose d'attaque d'antihistaminique a rapidement diminué les symptômes générés par les piqûres de guêpes, un des insectes à venin les plus coriaces.

" Vous n'êtes pas le seul à venir nous voir pour les piqûres de guêpes, a lancé l'infirmière au triage. On a beaucoup plus de visites pour les piqûres cet été. "

Il a toutefois été impossible de confirmer cette tendance à la hausse auprès du Centre intégré universitaire de santé et services sociaux (CIUSSS) du Saguenay-Lac-Saint-Jean, qui ne tient pas de données sur le sujet.

Nancy Laberge, propriétaire de V Extermination, à Alma, peut toutefois confirmer la hausse majeure du nombre de guêpes cet été. " Je dirais qu'il y en a au moins trois fois plus qu'à l'habitude ", lance la femme, qui fait elle-même l'extermination de tels insectes depuis dix ans au Saguenay_Lac-Saint-Jean.

Selon l'un de ses collègues interviewés dans les médias, le nombre de guêpes a atteint un sommet depuis 50 ans.

Nids plus grosNon seulement y a-t-il plus de nids, mais les nids sont également plus gros. " Ils sont souvent de la taille d'un gros melon d'eau ", dit-elle.

Au-delà des guêpes visibles, il y a aussi certaines espèces qui font un nid dans le sol, dans les interstices de la toiture ou dans les échangeurs d'air. " Il faut être plus minutieux dans ces cas-là, parce que les guêpes peuvent entrer dans la maison ", avertit Nancy Laberge.

Selon cette dernière, ce sont les conditions climatiques favorables, avec un printemps hâtif et de grosses chaleurs en été, qui ont favorisé leur présence accrue.

Ces observations sont difficiles à confirmer scientifiquement, car le ministère de la Faune, des Forêts et des Parcs ne tient pas de statistiques sur les insectes à venin.

Marjolaine Giroux, entomologiste à l'Insectarium de Montréal, ne peut confirmer la hausse, mais l'intérêt porté par les médias partout au Québec laisse suggérer une augmentation du nombre de piqûres.

" L'hiver doux, un été chaud et peu de pluie sont des conditions favorables pour favoriser les populations de guêpes et d'insectes sociaux ", explique-t-elle.

Robert Loiselle, entomologiste et professeur retraité de l'Université du Québec à Chicoutimi (UQAC), abonde dans le même sens pour expliquer l'augmentation perçue par plusieurs, mais qu'il n'a pas constaté personnellement.

Conseils pour éviter d'en être victime

Ce dernier explique qu'il existe deux groupes d'insectes à venin, soit ceux qui mordent ou qui sont des suceurs de sang, comme les taons ou les maringouins, et ceux qui piquent, comme les guêpes.

Alors que les abeilles piquent pour se défendre, et qu'elles en meurent par la suite, les guêpes survivent après avoir piqué. Ces dernières sont même de véritables chasseuses de protéines.

" Les guêpes adultes se nourrissent en partie de nectar de fleurs, mais elles chassent les mouches domestiques pour nourrir les larves ", dit-il.

C'est d'ailleurs l'odeur de protéines animales, lorsque l'on prépare un barbecue par exemple, qui attire les guêpes, renchérit Marjolaine Giroux.

" Quand on prépare de la nourriture à l'extérieur, il est préférable de garder la nourriture et les jus sucrés dans des contenants fermés pour éviter d'attirer les guêpes ", conseille-t-elle.

De plus, il est recommandé de porter des vêtements longs et des chaussures, et d'éviter de garder des tas de bois mort près de la maison, où les guêpes aiment se rassembler.

Pas de frelons au QuébecSelon certaines rumeurs, des frelons auraient fait leur apparition au Québec, mais ce n'est pas le cas, souligne Marjolaine Giroux.

" Les frelons viennent d'Asie et ils sont deux à trois fois plus gros que nos guêpes. Il n'y a aucune présence documentée au Québec. Au Canada, l'espèce a été retrouvée dans l'Ouest canadien, où elle a été introduite par bateau. "

Les autorités luttent ardemment pour éradiquer l'insecte, qui s'attaque notamment aux insectes indigènes, dont les abeilles et les guêpes.

Des reines solitaires pour passer l'hiverVers la fin du mois d'août, les populations de guêpes atteignent leur apogée. Et c'est au même moment que l'on voit apparaître les mâles et les futures reines, explique l'entomologiste Robert Loiselle. " Les mâles sont produits à partir d'un ovule non fécondé. Ils apparaissent pour se reproduire, puis ils meurent. "

En fait, les mâles ne fécondent pas les femelles sur-le-champ, car ces dernières conservent plutôt la semence dans une spermathèque, un organe similaire à un ballon qui permet de conserver les spermatozoïdes mâles jusqu'au printemps.

Seules les futures reines seront fécondées. Comme ces dernières apparaissent vers la fin de l'été, elles ne travailleront pas dans la colonie. Toutes les guêpes finiront par mourir, sauf la reine, qui se déplacera dans un endroit où passer l'hiver.

Les reines qui réussissent à survivre à l'hiver commenceront seules à bâtir un nid de la taille d'une balle de golf, dès le mois de mai, soutient Marjolaine Giroux. " Par la suite, la reine produira les premières ouvrières et le nid va grossir ", ajoute-t-elle.

Contrairement aux guêpes, qui construisent des nids, plusieurs espèces fondent plutôt leur colonie directement dans le sol.

Fait à noter : l'aiguillon des guêpes est formé à partir de l'ovipositeur, soit l'organe qui permet de pondre les oeufs, lequel s'est alors transformé pour devenir un redoutable mécanisme de défense.

Auteur : Initiative de journalisme local

Catégorie : Nouvelles

Publié le : 2021-09-07 18:46:52