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C'est le moment de commenter le rétablissement du caribou gaspésien

La période de consultation publique sur le tout nouveau programme de rétablissement du caribou de la Gaspésie a finalement été prolongée d'un mois.

Le public a donc jusqu'au 15 décembre pour envoyer ses commentaires sur ce document de 98 pages préparé par Environnement et Changement climatique Canada.

Ce nouveau programme de rétablissement est en fait une mise à jour du précédent, qui couvrait la période 2002-2012. On ne peut pas dire que ce fut un succès : celui-ci se fixait comme objectif d'atteindre 150 caribous en 2007 et 175 en 2012. Il en reste environ 75 aujourd'hui. Le caribou de la Gaspésie, qui forme le dernier troupeau au sud du Saint-Laurent, a été classé " espèce en voie de disparition " dès l'an 2000.

Sur le temps long, le déclin est sans appel : les caribous de Gaspésie forment une " sous-population relique " d'un cheptel autrefois beaucoup plus important, que l'on retrouvait alors dans toute la péninsule gaspésienne, les provinces maritimes et quelques États de Nouvelle-Angleterre. Dans les années 1950, il restait encore entre 700 et 1500 caribous en Gaspésie.

La perturbation de l'habitat, qui joue en faveur des prédateurs que sont le coyote et l'ours noir, a sans cesse réduit le territoire du cervidé. Aller se réfugier à de hautes altitudes, autour du mont Albert et des monts McGerrigle, représente son ultime stratégie d'évitement des prédateurs.

Principales responsables de ce déclin : les coupes massives de bois autour des monts Chic-Chocs.

" L'exploitation forestière qui a eu lieu jusqu'en 1970 sur le territoire du parc national de la Gaspésie et en périphérie a entraîné une modification de l'habitat qui fait qu'il n'est toujours pas propice au caribou depuis ", lit-on dans le programme de rétablissement. Ce dernier juge urgent de " favoriser la création d'aires protégées répondant aux exigences écologiques du caribou " et d'" encadrer les activités forestières dans l'aire de répartition du caribou de la Gaspésie par l'entremise d'un plan d'aménagement forestier répondant aux exigences écologiques de l'espèce ". Le contrôle des prédateurs est la priorité suivante.

Ce sentiment d'urgence face à l'exploitation forestière n'était pas exprimé aussi fortement dans le précédent programme de rétablissement (2002-2012) : la " bonification du plan d'aménagement forestier " n'était alors que la huitième priorité.

Réticences de l'industrie

Partout au Québec, le lobby forestier s'oppose à des mesures de protection du caribou qui seraient trop contraignantes, et le monde politique lui emboîte le pas.

" Je ne sacrifierai pas une seule job dans la forêt pour les caribous ", avait dit Philippe Couillard lors de la campagne électorale de 2014. Le maire de Sainte-Anne-des-Monts, Simon Deschênes, est aussi d'avis que la protection du caribou ne doit pas se faire au détriment de l'industrie forestière. L'an dernier, des pressions d'élus locaux de la Haute-Gaspésie avaient mené le ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs Pierre Dufour à reporter la présentation du programme de rétablissement.

Il faut dire qu'il y a dans ce plan de quoi donner des maux de tête aux entreprises qui vivent de la forêt : elle propose que dans une vaste zone allant jusqu'au fleuve Saint-Laurent (entre Cap-Chat et L'Anse-Pleureuse, approximativement), la " proportion d'habitat non perturbé " (c'est-à-dire non affecté par l'exploitation forestière) soit maintenue minimalement à 65%. Ce qui veut dire que la récolte de bois pourrait se faire sur un maximum de 35% de ce territoire, à des emplacements qui varieront avec le temps.

Cette proposition est tout à fait compatible avec la création d'une aire protégée dans les monts Chic-Chocs, pour laquelle il existe une importante mobilisation citoyenne depuis des années.

Le Comité de protection des monts Chic-Chocs préférerait voir un développement récréo-touristique plutôt que forestier dans cette chaîne de montagnes. Le programme de rétablissement du caribou de la Gaspésie note tout de même que les activités récréatives, incluant la randonnée, " constituent une menace, car elles entraînent les caribous à fuir vers des habitats qui comportent de plus grands risques de prédation ".

Auteur : La Presse Canadienne

Catégorie : Nouvelles

Publié le : 2020-11-15 05:07:44